Atelier « Découvrir une langue polynésienne » très enrichissant et sympathique
Une douzaine d’élèves de la seconde à la terminale sont venus à l’atelier libre consacré à la langue hawaïenne le jeudi 17 mai 2018 de 12h45 à 13h30 dans le cadre des ateliers proposés pour la Semaine des langues version 2018.
Comme l’année dernière où c’était l’alphabet coréen qui était au programme, le principe de l’atelier se référant aux objectifs et aux recommandations des instructions officielles consiste à découvrir ensemble une autre langue vivante avec un professeur qui ne la connait pas, mais souhaite en apprendre davantage par curiosité. La Semaine des langues incitent tout un chacun à aimer découvrir l’allophonie, d’autres systèmes linguistiques ou phonologiques, même de manière très limitée. Il faut rester avide de savoir car la connaissance empêche les clichés et les idées fausses. En langues vivantes, il faut toujours rester humble et spontané pour avancer dans les degrés de maîtrise des faits de langue ou des subtilités propres à chaque idiome.
Ici, avec une langue polynésienne, ce fut déjà intéressant de mettre en évidence les aspects phonologiques de la langue: ce qui nous a frappés c’est la suprématie des voyelles. De nombreux mots ne sont composés que de voyelles. Il n’existe pas de syllabes atones et tout se prononce. Il n’y a pas de sons difficiles à prononcer à part le ‘okina, une attaque vocalique marquée dans les textes modernes par une apostrophe. Ce n’est pas difficile en soi, c’est juste une histoire d’habitude. L’opposition voyelle brève-voyelle longue semble fondamentale car la longueur d’une voyelle change le sens du mot. La voyelle longue est reconnaissable au trait horizontal comme l’accent circonflexe en français.
En grammaire, comme il n’y a ni genres, ni pluriel, ni conjugaison, on pourrait penser que la langue est facile à apprendre. En fait, pour compenser ce manque de flexion, le polynésien recourt à des « marqueurs » ou des « affixes ». Dans la phrase de base, la phrase débute par le verbe, continue avec le sujet et les objets. Au début, il peut y avoir un, deux ou trois marqueurs différents pour indiquer le temps, le lieu ou la manière de le faire. Une autre caractéristique très polynésienne est l’expression de la possession: il y a la classe O, celle qui exprime des choses sur lesquelles nous n’avons aucun contrôle ou parce qu’elles nous sont données par la nature, les générations précédentes etc. La classe A exprime la propriété de ce nous fabriquons nous-mêmes, ce que nous contrôlons et décidons, ou parce que c’est notre génération ou la suivante. Ainsi, le « mon » dans « mon fils » et « mon père » n’est pas le même! Le père utilisera la classe A en tant qu’ascendant géniteur et le fils utilisera la classe O par filialité. L’autre sujet qui nous a fait sourire est la « réduplication » caractéristique des langues polynésiennes: on répète le mot entier ou deux syllabes ou une seule, ce qui a pour effet de donner de l’emphase au mot de départ. « Ma’i » signifie malade, donc ma’ima’i signifie tout le temps malade ou maladif. Le duel est aussi très caractéristique de l’hawaïen car il précise non seulement qu’il y a deux personnes concernées mais aussi si le locuteur est impliqué ou non dans les deux personnes concernées.
Ce qui est également étonnant à nos yeux c’est le fait que les Hawaïens n’utilisent ni le verbe « être » ni le verbe « avoir ». « Content moi » signifie « Je suis content »; « une maison à moi » signifie « J’ai une maison ». Donc les phrases nominales sont fréquentes; ainsi, si on utilise le marqueur « lieu où je suis au moment où je parle » , un pronom et un lieu, je n’ai plus besoin de dire « être » ou « se trouver » par exemple : (marqueur lieu) -lui – à l’école = Il est à l’école en ce moment. Aucun verbe!
Sinon, la langue nous a paru très chantante et agréable à entendre même si on est presque envahi par la kyrielle de voyelles.
Pour donner une idée, voici les premières lignes d’un livre pour enfants qui raconte l’histoire de ‘Ai’ai (remarquez la réduplication!) en expliquant qui est sa famille et qu’ils habitent l’île de Maui.
‘O Kū’ulakai ka makuakāne a’o Hinapukui’a ka makuahine. He keikikāne kā lāua ‘o ‘Ai’ai kona inoa. Noho lākou ‘ekolu i Hāna ma ka mokupuni ‘o Maui.
Merci aux visiteurs de l’atelier pour leur présence détendue et joviale,
Pascal Curin
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